Dans un courrier daté du 20 juillet adressé au préfet de Guyane, la Compagnie des Guides de Guyane (CGG) alerte sur « la situation alarmante du fleuve Kourou, résultant de l’orpaillage illégal qui ne cesse de s’y développer depuis plus de cinq ans ». Une alerte environnementale déjà lancée en « 2020 » rappelle la CGG qui demande « la mise en place d’une présence permanente des forces de l’ordre sur le Kourou ».
« Le 9 juin 2020, nous vous avions adressé un courrier faisant état de la situation et vous signifiant l’urgence de mettre en place des moyens à hauteur des enjeux cités. Malheureusement, force est de constater que, malgré votre engagement et les moyens mis en œuvre, l’action de l’Etat n’apporte à ce jour aucune amélioration significative. En effet, nous continuons à observer d’importants flux de marchandises et de personnels sur le fleuve et constatons avec effroi l’impact extrêmement préoccupant de ces activités sur le milieu aquatique » s’alarme la CGG, qui a réalisé « des meures au turbidimètres ces derniers jours au niveau des stations de captage d’eau potable de PK 21 et de Wayabo ».
Selon la CGG, ces mesures indiquent « la présence de Matières En Suspension (MES) bien supérieures aux normes » à savoir : un prélèvement de « 72 NTU soit 45 mg/l » en date du « 15/07/2023 station captage PK 21 à 12h00 » et un autre prélèvement de « 65 NTU soit 41mg/l » daté du « 15/07/2023 station captage Wayabo à 13h00 ». La CGG souligne que, « pour rappel réglementaire, selon le code de l’environnement, au-delà de 35 mg/l de MES, il y a atteinte au milieu aquatique. »
Enjeu de santé publique, le fleuve Kourou avec ses deux stations de captage alimente en eau plus de 100 000 Guyanais du littoral, de Kourou jusqu’à l’île de Cayenne. En 2019, l’affaire de l’AEX Nelson qui s’était judiciarisée avait fait grand bruit. Par ailleurs, le fleuve Kourou, vitrine de l’écotourisme de la “destination Guyane”, abrite les principaux écolodges de Guyane. » Sur les sept campements touristiques de forêt accessibles par le fleuve, cinq sont localisés sur ce cours d’eau. Cette activité légale et pérenne génère près de 2 millions d’euros de chiffre d’affaires par an et en pleine saison compte une soixantaine d’emplois directs » précise la CGG.
Enfin, la Compagnie des Guides de Guyane réitère sa « demande, faite dans (son) courrier du 9 juin 2020 quant à la mise en place d’une présence permanente des forces de l’ordre sur le Kourou. Lors des confinements, ces mesures avaient fait stopper l’activité des clandestins. De même, la présence de la Légion Étrangère accompagnée d’officiers de police judiciaire sur Léodate sur le haut Kourou avait empêché tout approvisionnement des sites illégaux. »
9 commentaires
Hum, pour ce préfet-ci c’est la quille dans deux semaines… Ça m’étonnerait fort qu’il aille prendre le risque de se démettre l’auriculaire maintenant, trois ans après la première alerte. D’ailleurs pas besoin d’alerter, notre État connait parfaitement la situation. Mais on sait bien qu’il n’a pas vraiment les ronds pour défendre son territoire amazonien. Inutile de remuer la machette dans la plaie. Quoique, l’espoir reste cependant permis. Vu que les militaires français basés au Niger risquent de devoir à nouveau dégager, juste après s’être fait virer du Mali… Un rapatriement d’une toute petite partie de la force Barkhane (un renfort de 20 pelés suffirait) pour venir défendre le fleuve emblématique du port spatial de l’Europe…ça ne serait finalement pas si compliqué. Bon en même temps, il est vrai qu’il n’y a pas d’uranium par chez nous.
Tant que la situation reste médiatiquement confinée à la Guyane, il y a peu d’espoir de voir du changement.
Personne pour publier des photos sur le terrain ou par drone des ravages commis en toute impunité semble-t-il à deux pas du centre spatial européen ?! Nous avons pourtant désormais des réseaux sociaux qui permettent de faire connaitre au monde entier les choses inacceptables.
Cette situation devrait également être dénoncée à l’échelle Européenne par des lobbys de défense de la nature. Sans pression médiatique et donc politique par la suite, rien ne changera.
Les partis écologistes donnent certes de la voix pour la lutte contre les discriminations, droits des minorités, etc… mais la situation Guyanaise échappe à toute prise à bras le corps.
Sur le site de EELV, le moteur de recherche n’indique aucun article sur l’orpaillage clandestin en Guyane sauf un sur le soutien aux hurleurs qui date de 2014 ! https://www.eelv.fr/?s=guyane
Que comprendre quand des partis sensés défendre mieux que les autres la forêt Guyanaise sont aveugles et muets devant la catastrophe de l’orpaillage illégal, qui dure depuis maintenant plus de 30 ans ?!
L’Etat intemporel et sa cinquième armée dans le monde, attendrait donc depuis trente ans une pression médiatique nationale des partis écologistes parisiens, pour enfin se décider à assumer ses prérogatives régaliennes, aux fins de protéger et contrôler efficacement son territoire… Votre mansuétude laisse songeur Morvandiau. Rassurez-vous Guyanais, votre État ne vous a pas abandonnés! Tout ça c’est la faute aux lobbys, à Rousseau et Jadot, qui vous ignorent. Aussi tortueux que le Kourou votre sens de la gouvernance.
Mon message ne s’adressait pas à vous.
Mais bon, comme vous pensez que la pression médiatique – et par voie de conséquence politique – n’est pas une solution pour engager l’État dans ses responsabilités, peut être allez vous nous expliciter la votre ?
Avant toute quête de solutions toutes faites. Garder les idées claires ou les éclaircir pour certains, sur l’origine de la défaillance de l’institution semble un préalable incontournable. Il faudrait donc d’abord reconnaître et admettre un lourd et lointain déficit local des moyens régaliens. Pour le moment lorsque l’on écoute les préfets, celui qui part, celui qui arrive, tout va très bien à ce niveau. Ils sont dans leur rôle de communicants ceci-dit. De notre point de vue de citoyens locaux, le plus gênant c’est que bon nombre d’entre nous semblent s’échiner à excuser ou édulcorer cette carence. Ce qui est totalement annihilant du point de vue de la prise de conscience politique citoyenne, locale.
« c’est que bon nombre d’entre nous semblent s’échiner à excuser ou édulcorer cette carence. » Non, l’immense majorité des citoyens locaux s’en bat l’œil complètement. La classe politique locale suit le mouvement, en dehors de quelques frémissements purement figuratifs.
Le mouvement des hurleurs de Guyane contre l’orpaillage illégal a fait pschitt après 3 années laborieuses à tenter de mobiliser les Guyanais, en vain.
Mais comment sensibiliser à la protection de la forêt Guyanaise si à la base la majorité des Guyanais n’y mettent jamais les pieds et ne s’intéresse pas à elle ?
On a envie de protéger quelque chose que lorsqu’on prend conscience de sa valeur.
Et cette conscience n’est pas présente localement, très paradoxalement. Au contraire, c’est l’envie de la balafrer de routes, de champs à subventions, de mines industrielles, et de bruler son bois pour faire tourner les climatiseurs qui domine.
Sauf à plébisciter des milices citoyennes, la « protection », la vraie, ne peut venir que l’institution politique détenant les moyens d’action. Tout passe donc d’abord par la dénonciation claire et nette de son inaction. Or à titre d’exemple, vous en êtes visiblement bien incapable. Car plutôt que de hurler sur le mastodonte qui roupille alors qu’il est missionné, armé et payé pour agir, vous préférez sermonner la piétaille citoyenne prise dans ses contingences quotidiennes et de facto inapte à protéger quoi que ce soit. En gros vous espérez que les 50% vivant sous le seuil de pauvreté aille se balader en forêt pour se conscientiser, et que les 20% les mieux lotis quittent la plage et les carbets pour aller militer pour l’environnement. Donc in fine, mêmes parmi les plus conscientisés, ces hurleurs qui sont bien incapables d’aller camper devant la prèf ou de bloquer des rond-points pour contraindre l’action publique, restent des pitres inutiles en terme d’efficacité politique… Ils attendent quoi? que les 500 frérots viennent les rejoindre pour faire le sale boulot, c’est à dire foutre un bordel efficace, à leur place? Le militantisme de pacotille a toujours ses limites…Trop facile d’accuser l’inertie ambiante quand on ne se donne pas soi-même les moyens de la contestation.
J’attends toujours votre solution puisque la pression médiatique et politique n’en est pas une à vos yeux. Supposer mes manques et incapacités n’en est pas une valable à mon avis.
Alors ?
Ben justement, si ceux tels que vous se sentant pleinement concernés par cet enjeu, ferment les yeux sur les carences de l’Etat et ne les dénoncent pas… Cela induit une forme d’hypocrisie globalement incapacitante du point de vue de l’action politique. A quand les manifestations des hurleurs devant la préf pour réclamer des moyens à la hauteur? Je ne dis pas que vous obtiendrez forcément gain de cause, mais vous réussiriez au moins à initier l’ébauche d’un militantisme local actif sans ambiguïté sur les causes. Et à partir de là, vous aurez des vigies efficaces pour allez prendre vos photos…mais surtout structurer, fédérer, et donc accroître la revendication politique. Rien de garanti, mais bien plus crédible que vos espoirs dans la prise de conscience médiatique ou politique parisienne…