Une enquête de l’Insee Guadeloupe sur la situation scolaire et professionnelle des jeunes de 15 à 29 ans indique qu’un quart des jeunes de l’île ne sont ni en emploi, ni en études, ni en formation. En Guyane, l’Institut national de la statistique estime à 36,7% le nombre de jeunes dans la même situation. Une proportion trois fois supérieure à celle de l’Hexagone.
On les appelle les Neet. Cet acronyme anglais de not in employment, education or training désigne les personnes éloignées de tout emploi, formation ou étude. D’après une enquête de l’Insee Guadeloupe, parue le 19 janvier et focalisée sur la jeunesse, 27% des 15-29 ans de l’île étaient en moyenne dans ce cas de figure entre 2015 et 2019.
« La situation est similaire en Martinique avec 25,6% de jeunes concernés, soit deux fois plus qu’en Hexagone » indiquent les auteurs de l’étude. Mais c’est à La Réunion et en Guyane (Mayotte n’est jamais évoquée) que la part de Neet est la plus importante avec respectivement 30,2% et 36,7% des 15-29 ans qui sont sans emploi, sans formation ou ne suivent pas d’études.
Un constat éloquent pour la Guyane où un habitant sur deux est âgé de moins de 25 ans, faisant du département le 2e plus jeune de France après Mayotte. D’après l’Insee, ces difficultés d’insertion s’expliquent par « l’exiguïté du territoire et l’étroitesse du marché économique« . Un phénomène évoqué par l’économiste réunionnais Jean-François Hoarau, récemment interviewé par Guyaweb.
« Beaucoup de jeunes et peu d’emploi »
Autre constat relevé par l’enquête Insee, plus l’on avance en âge, plus l’on risque de se retrouver sans emploi, ni formation, ni études car « de manière générale, c’est l’âge, en particulier parce qu’il est lié à l’arrêt progressif des études, qui influe sur le nombre de jeunes en situation de Neet« .
Si « 8,3% des jeunes Guadeloupéens entre 15 et 19 ans sont sans emploi ni formation, ils sont 38,4% chez les 20-24 ans et 43,7% chez les 25-29 ans« , précisant qu’au « niveau national cette évolution est plus contenue » de 5,7% pour la tranche la plus jeune à 18,1% pour les plus âgés.
Des chiffres qui ne permettent pas d’apprécier la diversité de situations des Neet, « très variées » selon l’Insee. « Le sexe, la situation familiale, le niveau de diplôme ou encore l’origine sociale » sont les principaux facteurs qui déterminent la situation des jeunes sur le marché du travail. En outre, « leur insertion professionnelle est diverse, marquée notamment par des épisodes d’alternance, plus ou moins longs, entre emploi et chômage. Ainsi, un jeune peut être Neet de façon temporaire, régulière (entre deux emplois successifs) ou durable » écrivent les auteurs.
En Guyane, les difficultés d’insertion professionnelle des jeunes ont également été documentées, toujours par l’Insee, dans une étude publiée en juillet 2019 et intitulée « Beaucoup de jeunes et peu d’emploi ». Cette dernière pointait déjà le manque de débouchés professionnels pour les jeunes Guyanais.es et un « accès à l’emploi difficile, en particulier pour les moins diplômés et les étrangers« .
De plus, emplois et formations étant concentrés autour de Cayenne – deux emplois sur trois se trouvent dans la Communauté d’agglomération du centre littoral -, la problématique de « l’éloignement géographique à l’emploi d’une partie de la population » est récurrente. Dans l’Ouest, où 35% de la population résident, seuls 18% des emplois du territoire sont proposés.
62% des jeunes prêts à quitter la Guyane
Car en plus de l’éloignement géographique, la Guyane souffre d’une offre d’emplois insuffisante. En 2019, 66 000 emplois pour 100 000 actifs étaient dénombrés par l’Insee. Et ce sont les plus jeunes, avec le moins d’expérience, qui éprouvent le plus de difficultés pour entrer sur cet étroit marché du travail.
Ainsi, « seuls 32% des 18-29 ans de Guyane sont en emploi. Chez les 25-29 ans, à l’âge où la majorité a fini ses études, seuls 58% sont en activité contre 76% aux Antilles et 86% en France métropolitaine » écrivent les statisticiens de l’Insee Guyane.
Le tout dans un contexte où la poursuite d’études est loin d’être une évidence en Guyane. Toujours d’après l’Insee, « plus d’un Guyanais sur deux n’est plus scolarisé dès l’âge de 19 ans, alors qu’en France métropolitaine, ils sont encore 72 % en étude au même âge« .
Il faut dire que l’offre de formation est peu abondante et largement concentrée sur Cayenne. Résultat, 62% des jeunes Guyanais sont prêts à quitter leur département afin de bénéficier de plus larges opportunités relève l’étude de l’Insee. Un « départ vers la France métropolitaine souvent gage de réussite » indiquent les auteurs, qui nuancent cependant car ce départ concerne essentiellement la « population de nationalité française et dont les ressources permettent de l’envisager« .
Photo de Une : des jeunes à la Mission locale de Cayenne © Archives Guyaweb
4 commentaires
C’est triste… On aimerait bien entendre l’avis des politiques sur ce sujet…
Ils se battent ardemment pour notre autonomie, après tout ira mieux.
A des degrés divers, on remarque quand même une tendance lourde, quasi similaire dans toutes les régions ultramarines… Soit ce sont les politiques locaux de ces différentes contrées qui sont tous…et tout le temps, inaptes quelles que soient les latitudes. Une sorte d’impéritie endémique fortuite, perpétuellement reproduite à l’identique quel que soit le contexte et l’océan… Soit cette généralisation de l’échec dans la plupart de ces lointains ensembles périphériques de la république, est le signe d’une défaillance bien plus globale et bien plus centrale, trouvant sa source beaucoup plus haut dans la hiérarchie des politiques publiques. La même défaillance, qui produit une inaptitude semblable lorsqu’il s’agit cette fois de combattre efficacement l’orpaillage illégal ou le pillage des ressources halieutiques. Une sorte de torpeur républicaine exotique, de dilatation de la volonté politique, s’emparant dés lors de la puissance publique à mesure qu’elle s’éloigne de son giron géographique historique.
Les travailleurs non déclarés sont des Neet ?