Les sénateurs ont adopté un budget en augmentation de 6% par rapport à 2024 pour les Outre-mer, mercredi 15 janvier, lors de la reprise des travaux parlementaires sur le projet de loi de finances. Loin de la copie proposée par l’ancien Premier ministre Michel Barnier, avec des crédits pour la mission Outre-mer qui étaient en baisse de 250 millions d’euros (-12%). L’augmentation du budget pour les Outre-mer concerne surtout Mayotte et la Nouvelle-Calédonie.
Redevenus un ministère de plein exercice dans le gouvernement Bayrou, les Outre-mer voient également leur budget être augmenté. Mercredi 15 janvier, lors de la reprise au Sénat des travaux parlementaires sur le projet de loi de finances (PLF), les sénateurs, à l’exception des communistes, ont largement voté pour une hausse du budget 2025 par rapport au projet de loi initial.
Suite à l’adoption d’un amendement à 400 millions d’euros, le budget de la mission Outre-mer se chiffre désormais à 3 milliards d’euros en crédits de paiement et 3,5 milliards en autorisations d’engagements. Des augmentations de 6% et 11% par rapport au projet de budget initial alloué aux Outre-mer, inférieur à 3 milliards d’euros. Tous ministères confondus, « l’effort au profit des Outre-mer atteint 25 milliards d’euros » a souligné mercredi au Sénat Manuel Valls, récemment nommé ministre d’Etat en charge des Outre-mer.
Une bonne nouvelle alors que le précédent gouvernement, dirigé par Michel Barnier et censuré le 4 décembre, prévoyait une baisse notable des crédits de paiement pour les Outre-mer, de l’ordre de 250 millions d’euros. « Une diminution d’à peu près 12% » par rapport à 2024 nous avait expliqué lors d’un brief presse, en octobre, la conseillère en charge du budget, des finances locales, de l’évaluation des politiques publiques et du suivi du comité interministériel des Outre-mer, auprès du ministre chargé des Outre-mer.
De quoi faire bondir les parlementaires ultramarins, dont nos deux sénateurs qui avaient dénoncé dans une tribune parue sur Libération « un désengagement de l’Etat » et une « très mauvaise lecture des situations de crise que traversent nos territoires, en parfaite contradiction avec l’ampleur de la réaction de l’État attendue par nos populations ».
« Le programme des collectivités était le plus impacté. Nous avions fait du lobbying auprès de Michel Barnier pour revoir cette copie et éviter la double peine d’une baisse des dépenses alors que les territoires ultramarins ont besoin de rattrapage« , nous explique le sénateur guyanais Georges Patient, rapporteur du budget dans la commission des finances du Sénat.
« Mayotte et la Nouvelle-Calédonie sont devenues plus visibles »
Depuis, le cyclone Chido a dévasté Mayotte, rendant difficile politiquement une nouvelle coupe franche dans le budget des Outre-mer. L’augmentation de l’enveloppe concerne d’ailleurs surtout Mayotte et la Nouvelle-Calédonie. Cent millions d’euros supplémentaires ont notamment été votés pour la reconstruction de l’archipel mahorais. Et pour la Nouvelle-Calédonie, frappée en 2024 par des émeutes destructrices sur fond de crise politique, la subvention pour la reconstruction des écoles et bâtiments publics a été portée, via un nouvel amendement du gouvernement, à 200 millions d’euros.
« Il faudra aller encore plus loin en ce qui concerne Mayotte » a souligné Manuel Valls, faisant référence au plan gouvernemental « Mayotte debout » qui comporte une loi d’urgence pour la reconstruction de l’archipel qui sera examinée au Sénat à partir du 3 février ainsi qu’une loi-programme pour la reconstruction à plus long terme qui doit voir le jour d’ici trois mois.
« Mayotte et la Nouvelle-Calédonie sont devenues plus visibles, concède Georges Patient, mais ce ne sont pas les seuls territoires à bénéficier de cette progression. » La Guyane profite ainsi d’un doublement de sa dotation pour la construction d’établissements scolaires, qui passe de 2,5 millions à 5 millions d’euros. Les Corom, « Contrats de redressement Outre-mer pour les communes », sont également réévalués en Guyane, de 4 à 10 millions d’euros. Cayenne et Iracoubo sont les deux collectivités locales à bénéficier de ce plan d’aide. Selon Georges Patient, « les contrats de convergence et de transformation (CCT) sont aussi revus à la hausse. Et 56 millions d’euros ont été alloués à la continuité territoriale en Outre-mer« , budget également en augmentation.
Pour la sénatrice Marie-Laure Phinéra-Horth, il est « naturel que l’État se mette au chevet de nos compatriotes mahorais après ce qu’ils ont subi » mais « je ne peux accepter ce principe de déshabiller Pierre pour habiller Jacques. Tous les territoires ultramarins doivent faire face à des urgences et à des retards structurels. Il est indéniable que ce budget a été artificiellement gonflé par la situation de Mayotte et Nouvelle-Calédonie« .
Ce budget en augmentation est donc « un trompe-l’oeil » pour la sénatrice. « J’espère juste qu’il ne serait pas nécessaire que la Guyane soit frappée par une catastrophe naturelle pour que l’État ose débloquer une enveloppe exceptionnelle pour nous. » À titre d’exemple, l’ex-maire de Cayenne avait repris au Sénat un amendement du député Davy Rimane qui visait à octroyer à la Guyane une enveloppe de 5 millions d’euros pour préparer un schéma de développement routier. « L’amendement n’a pas été adopté alors que le problème de l’enclavement en Guyane reste prégnant. D’autres collègues, notamment de la Martinique et de la Guadeloupe, ont tenté d’alerter le gouvernement sur les sujets de fonds liés à la vie chère. Sans grand succès.«
Ce nouveau budget de la mission Outre-mer, désormais amendé et adopté par le Sénat, sera ensuite examiné en commission mixte paritaire à partir de février, sans repasser devant l’Assemblée nationale.
Photo de Une : les travaux parlementaires sur le projet de loi de finances ont repris mercredi au Sénat par les crédits de la mission Outre-mer © Creative commons
*Article mis à jour à 15h15 avec la réaction de Marie-Laure Phinéra-Horth
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