Débuté en 2022, le chantier à près de 200 millions d’euros de doublement du pont du Larivot qui devait être terminé en 2024, peine à avancer à cause de nombreuses difficultés géotechniques liées tant au niveau des fondations des piles que sur la consolidation des sols et des remblais de la rive droite à Matoury, là, où les travaux ont pourtant commencé. Une instance technique devant fournir des pistes de solutions a été mise en place en octobre dernier par l’État, maître d’ouvrage de ce projet réalisé par l’entreprise Vinci. Des solutions ont été trouvées pour les pieux de fondation et les piles du pont, en revanche les études se poursuivent pour le remblai de la rive droite où les difficultés s’accumulent, et ont été dénoncées à plusieurs reprises par le député de la 1ère circonscription Jean-Victor Castor.
Alors que sa mise en service était initialement annoncée pour 2024, les travaux de doublement du pont du Larivot accusent un sérieux retard d’autant plus inquiétant qu’il semble lié à des blocages techniques difficilement surmontables. Ces difficultés, tant au niveau des fondations des piles que sur la consolidation des sols et des remblais de la rive droite à Matoury, ont conduit en octobre dernier à un quasi-arrêt de ce projet acté en 2017 dans les Accords de Guyane pour désenclaver l’Île de Cayenne.
Ces difficultés ont été à plusieurs reprises dénoncées par le député de la 1ère circonscription Jean-Victor Castor, notamment dans une question écrite au gouvernement publiée en décembre au Journal Officiel. L’élu y accuse l’État, maître d’ouvrage de ce projet, d’avoir persisté à « réaliser ce projet sur la base d’éléments et documents d’aménagement dépassés (Plan global des transports de 2013) », sans prise en compte « des contraintes géotechniques des sols« , en particulier sur la rive droite du pont, là où les travaux ont pourtant commencé début 2022. Or, d’après le député, ces difficultés étaient anticipables, l’enquête publique du projet ayant permis d’établir un planning prévisionnel des travaux indiquant que « le pont serait principalement réalisé depuis la rive gauche à Macouria, étant donné la présence de très mauvais sols en rive droite à Matoury ».
Dans sa réponse écrite, le ministère des Transports indique que « les caractéristiques principales des sols, en particulier en rive droite, étaient documentées avant l’engagement des travaux et portées à la connaissance des entreprises candidates dans le cadre de l’appel d’offres pour leur permettre de définir leur organisation et les techniques à mettre en œuvre« .
Le groupement d’entreprises retenu pour le projet est donc seul responsable, selon l’État, du choix de commencer les travaux en rive droite. Une implantation justifiée par les besoins d’optimisation de la logistique du chantier, l’atelier de préfabrication des voussoirs du tablier et les lieux d’approvisionnement en matériaux se situant tous sur la rive droite à Matoury.
Or c’est pourtant sur cette rive droite que les difficultés s’accumulent, tant au niveau des fondations des piles que sur la consolidation des sols et des remblais. Leur fragilité empêche de poser les culées devant permettre la pose du pont. A ce jour, seules deux piles sur les 19 de cet ouvrage d’1,3 km de long ont été construites.
Pour autant, le groupement d’entreprises ne déplacera pas le chantier sur l’autre rive, nous avait indiqué en octobre le directeur de la DGTM, Ivan Martin. Cette option a été écartée en l’absence de place « pour installer une plateforme de chantier » sur la rive gauche à Macouria. Par ailleurs, un « tel transfert nécessiterait également de devoir fermer le pont du Larivot toutes les nuits pour faire passer de l’autre côté les machines et le matériel« , expliquait Ivan Martin à Guyaweb.
Reprise de la construction des piles dans « les prochaines semaines »
L’option retenue est donc de solutionner les difficultés géotechniques rencontrées sur la rive de Matoury. Pour ce faire, une instance de dialogue technique a été mise en place début octobre.
Réunissant l’entreprise en charge de la construction (Dodin Campenon Bernard, filiale du groupe Vinci), le maître d’œuvre (Egis), le maître d’ouvrage (l’État) et plusieurs experts en fondation dépêchés depuis l’Hexagone, cette instance s’est tenue durant deux mois sous l’égide de l’inspecteur chargé des ouvrages d’art auprès de la direction générale des infrastructures, des transports et de la mobilité du ministère des Transports. Des experts géotechniciens de la maîtrise d’oeuvre et du groupement de construction ont également participé à ces travaux, aux côtés des services spécialisés du Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement (Cerema) afin d’adapter l’organisation et les techniques du chantier aux difficultés rencontrées.
Cette instance a permis de trouver une solution technique pour les piles en rivière, grâce à un sondage d’essai réalisé en fin d’année. Des moyens de forages complémentaires adaptés pour le chantier vont être dépêchés en Guyane. En complément, « une campagne de sondages géotechniques est en cours pour reprendre la foration et la construction des piles de l’ouvrage dans les prochaines semaines » nous précisent les services de l’État, contactés par mail. Pour la réalisation des pieux de l’ouvrage d’art, préalable à la construction des piles, d’autres outils de foration et de consolidation des sols « sont en cours d’acheminement » ajoute la préfecture de Guyane.
En revanche, concernant la consolidation du remblai en rive droite, qui doit être stable pour permettre le lancement du tablier du pont, des études complémentaires sont en cours « pour analyser l’état de consolidation du massif et les conditions de réfection des inclusions rigides défectueuses« . Les experts continuent donc de chercher des solutions.
En attendant la reprise des forages et la pose des pieux et des piles, le chantier n’est pas à l’arrêt mais il tourne au ralenti. « La construction des éléments préfabriqués se poursuit, mais est fortement ralentie sur sa partie fondation, que ce soit sur les piles en rivière ou le remblai en rive droite« , indique la préfecture.
Il est d’ores et déjà sûr que la mise en service du pont prévue pour 2025 ne pourra être effective. Ce retard générera des millions d’euros de frais supplémentaires, le matériel immobilisé étant très coûteux. Ces surcoûts font d’ailleurs l’objet d’échanges entre le maître d’ouvrage, le groupement d’entreprises et le maître d’oeuvre Egis afin de trouver une remédiation quant aux conséquences des difficultés du chantier sur le contrat public signé entre ces parties. L’objectif étant de trouver une solution amiable et non contentieuse sur ces aspects juridiques et financiers.
L’état d’avancement des travaux, ainsi que les solutions garantissant la pérennité de l’ouvrage, feront l’objet d’une réunion organisée par le préfet en 2025 indique le ministère des Transports. Pour l’instant, la tenue de ce comité de suivi n’est pas encore programmée, compte tenu d’une « dynamique calendaire de poursuite du chantier » pas encore « stabilisée » selon les services de l’État.
Photo de Une : le projet de doublement du pont du Larivot, dont la mise en service devait intervenir en 2025, est fortement ralenti en raison de difficultés géotechniques rencontrées par le groupement en charge de la construction de cet ouvrage d’art © Facebook Jean-Victor Castor
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