L’Assemblée nationale a adopté mercredi en première lecture, à une large majorité, le projet de loi d’urgence devant faciliter la reconstruction de Mayotte, dévastée en décembre par Chido, le cyclone le plus destructeur depuis 90 ans. Ce texte de loi permet notamment de déroger à certaines règles d’urbanisme, de réserver une part des marchés publics aux petites entreprises mahoraises et de faciliter les dons de particuliers. Il constitue la première réponse du gouvernement pour venir en aide à l’archipel, avant l’examen en mars d’une loi-programme pour la reconstruction à plus long terme.
Après trois jours d’examen à l’Assemblée, les député(e)s ont adopté en première lecture à une large majorité – 446 voix pour, 2 contre et 110 abstentions – le projet de loi du gouvernement visant à faciliter la reconstruction de l’archipel mahorais, frappé le 14 décembre par un cyclone dévastateur.
« Au-delà des clivages politiques, il y a une impérieuse exigence, ne pas laisser tomber Mayotte » a salué par communiqué après l’adoption de ce texte de loi le ministre des Outre-mer, Manuel Valls. Le projet de loi, qui contenait 22 articles initialement, a été enrichi par les députés et en compte désormais 45.
Parmi les principales mesures, le texte prévoit la mise en place d’un établissement public dédié à la reconstruction, intégrant les missions de l’Etablissement public foncier et d’aménagement de Mayotte (Epfam). L’Etat pourra aussi construire, reconstruire ou rénover des écoles à la place des collectivités territoriales, jusqu’au 31 décembre 2027, via un transfert temporaire de ces compétences.
Le projet de loi définit également l’adaptation des règles d’urbanisme – sur le modèle de ce qui a été mis en place à la suite des émeutes de juin 2023 – et de commande publique afin de simplifier et accélérer les projets de reconstruction, tout en favorisant la participation des entreprises mahoraises à qui 30% des marchés publics seront réservés. L’importation de matériaux de construction depuis l’Hexagone privilégiée à l’utilisation de ressources locales a néanmoins été critiquée par le député guyanais Davy Rimane qui s’est exprimé au nom de son groupe avant le vote solennel du texte, mercredi.
Les dons à destination de Mayotte seront aussi facilités, sur le modèle de la reconstruction de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Et enfin, différentes mesures temporaires sont mises en place pour la population et les professionnels, notamment sur l’accès au logement social ou l’exonération de charges pour les entreprises.
Au cours des débats à l’Assemblée nationale, plusieurs mesures ont été introduites comme l’interdiction de la vente de tôles aux particuliers pour lutter contre l’habitat illégal, complétée par une aide à la reconstruction des toits. Cet amendement est une initiative de la rapporteure du texte, Estelle Youssouffa, députée Liot de Mayotte. Une ordonnance permettant des mesures rapides pour lutter contre les bidonvilles a également été ajoutée.
Les députés ont en revanche rejeté à la quasi-unanimité une mesure du gouvernement visant à faciliter les expropriations. L’article du projet de loi aurait autorisé le gouvernement à ordonner « l’expropriation définitive d’emprises foncières à Mayotte, dans l’objectif d’y faciliter » des chantiers. Une manière de « mettre la main sur le foncier » de Mayotte selon la rapporteure du projet de loi, la députée mahoraise Estelle Youssouffa (Liot), citée par Le Monde. « Le but de cet article était vraiment de pouvoir exproprier à Mayotte pour construire n’importe quoi et mener à bien des projets qui n’ont rien à voir avec le cyclone. »
L’article 3 du projet de loi, qui prévoyait de faciliter l’implantation de constructions temporaires permettant l’hébergement d’urgence, a lui aussi été supprimé.
Désormais amendé et adopté par l’Assemblée nationale, le texte va poursuivre sa route législative devant le Sénat.
Lutter contre l’habitat illégal et l’immigration clandestine
« Nous ne transigerons avec rien pour reconstruire l’île sur des bases plus saines, pour changer son visage et, à travers elle, la vie des Mahorais. Ce projet de loi est donc une réponse incontournable, mais il n’est qu’une première réponse » a souligné Manuel Valls.
En effet, le gouvernement souhaite aller au-delà des mesures d’urgence pour reconstruire Mayotte et présenter d’ici mars un projet de loi-programme de refondation, « Mayotte Debout », qui se veut « structurel et ambitieux » selon Matignon. Dans ce texte sont par exemple prévues l’instauration d’une zone franche globale pour le développement économique de l’archipel, mais aussi et surtout de nombreuses mesures pour lutter contre l’habitat illégal et l’immigration clandestine.
« Si le cyclone a ravagé Mayotte, il a surtout révélé et exacerbé des calamités qui existaient déjà » a déclaré lundi le ministre des Outre-mer. « 50% de la population est étrangère, l’immigration clandestine pèse sur tous les aspects de la vie quotidienne, elle nécrose Mayotte. Il faudra renvoyer les illégaux chez eux » a-t-il ajouté.
De quoi s’attendre d’ici deux mois à des mesures très droitières, remettant par exemple en cause le droit du sol, mais aussi à des débats houleux sur la question migratoire comme l’ont déjà laissé entrevoir les échanges à l’Assemblée entre notamment des élus écologistes et la députée mahoraise Estelle Youssouffa.
« Ce texte [la loi d’urgence] a invisibilisé la solidarité nationale pour y introduire à la place des éléments idéologiques. Avec naïveté, j’avais pensé que la gravité de la situation suffirait à ne pas dénaturer un texte d’urgence dont l’ambition première était de répondre aux besoins essentiels de nos compatriotes de l’île aux parfums » a quant à lui réagi depuis le perchoir de l’Assemblée le député guyanais Davy Rimane, président de la délégation Outre-mer à l’Assemblée nationale.
« Vous Monsieur le ministre, vous Madame la rapporteure, qui avez réaffirmé des positions claires sur la question migratoire, ces personnes à qui l’on refuse tout droit au logement, aux aides d’urgence, à toute considération, que comptez-vous faire avant de pouvoir réaliser votre souhait de les expulser ? Car ces personnes sont bien présentes en chair et en os sur l’île. Est-ce qu’une réflexion a été menée sur ce sujet essentiel ? Il me semble plus qu’urgent que des réponses soient apportées à de telles questions qui interrogent notre façon d’appréhender l’altérité » avait affirmé le député mercredi avant le vote solennel du texte.
Photo de Une : l’Assemblée nationale a adopté ce mercredi en première lecture la loi d’urgence pour la reconstruction de Mayotte © capture d’écran LCP
2 commentaires
FF s’est fait censurer son article sur le procgé…ou bien?
« Vous Monsieur le ministre, vous Madame la rapporteure, qui avez réaffirmé des positions claires sur la question migratoire, ces personnes à qui l’on refuse tout droit au logement, aux aides d’urgence, à toute considération, que comptez-vous faire avant de pouvoir réaliser votre souhait de les expulser ? Car ces personnes sont bien présentes en chair et en os sur l’île. Est-ce qu’une réflexion a été menée sur ce sujet essentiel ? Il me semble plus qu’urgent que des réponses soient apportées à de telles questions qui interrogent notre façon d’appréhender l’altérité » (Davy Rimane)
Le type que madame pipi, cette grande experte de la takiya, voudrait donc faire passer pour un xénophobe…