Le chanteur et musicien João Gilberto, l’une des figures de la Bossa Nova style musical brésilien créé à la fin des années 50, s’est éteint ce samedi 6 juillet à l’âge de 88 ans. Le romancier de la bossa nova, Jean-Paul Delfino auteur d’une série de romans notamment Bossa Nova, la grande aventure du Brésil aux éditions Le Passage (2017) , lui rend hommage à travers une tribune pour Guyaweb.
L’essentiel est ailleurs
Joao Gilberto n’est plus. Son enveloppe terrestre, en tout cas, a décidé de tirer sa révérence. Trop d’ennuis avec les maisons de disques. Trop de procès. Trop de malentendus familiaux, aussi. Trop de dictature, même si celle-ci est qualifiée de dictature de velours. Trop de tout. Et plus assez de temps.
Joao Gilberto est parti. Certes. Mais il laisse derrière lui l’essentiel de son existence. Sa vie. Son essence-même. Il nous transmet son héritage le plus précieux. Sa musique. Et encore. Joao n’a presque rien composé. Mais il a fait mieux que cela.
Sur des sambas des années folles et jusqu’aux années 1940, il a revisité le samba. D’un rythme solaire, explosif, jouissif, il a fait un murmure. Il a transformé les hurlements en soupirs pudiques. D’éclats de rire, il a fait un dialogue d’amoureux, de ceux qui se chuchotent à l’oreille. Il a joué à l’alchimiste de génie. Il a inventé un style. La Bossa Nova.
Joao Gilberto est parti. Et alors ?
Il n’y a que les fous et les aveugles qui se désespèreront de son absence physique. L’essentiel est ailleurs.
De toutes les légendes plus ou moins vraies qui courent sur son compte, celle-ci tente de dire l’homme. Ou, du moins, de ne pas trop le trahir.
« Le pêcheur d’étoiles »
Le Bahian de Juazeiro ne craint pas de conduire la nuit. Il est protégé. Les rares amis qu’il emmène pour ces virées nocturnes vous le confirmeront. Il est protégé. Sur la route qui mène à la Pedra de Guaratiba, dans la baie de Sepetiba, il conduit avec une absolue confiance. Il est même tellement sûr de lui qu’il conduit la plupart du temps les yeux fermés. Bien entendu, cela peut paraître effrayant mais, lui, il est sûr que ce sont les étoiles qui le guident. Les étoiles ou, selon les sources et les versions, son orixá, son ange gardien. Ils ne l’ont jamais trahi. Il n’a jamais eu d’accident. »
(Tiré de Bossa Nova, la grande aventure du Brésil – 2017 – Editions Le Passage)
Tribune de Jean-Paul DELFINO
1 commentaires
Gilberto Gil, la Bossa Nova, qui s’en souvient de ces heures, de ces rencontres ou encore jeunes et inexpérimentés nous qui sommes devenus des vieux cons, projetions de reconstruire le monde, autour des tables de nos soirées justement reconstruction du monde, croyant encore possible l’expansion d’une communauté humaine fraternel, malgré la dictature, les opérations condors et autres dans ce bresil que nous fantasmions malgré la dictature érigée avec le soutien de la CIA.
On s’est trompé, ou on a laissé tomber. Aujourd’hui Bolsonaro caricature dans ses propos les condoléances qu’il adresse à la famille de Gilberto. Fin d’une époque peut être mais l’esprit restera toujours. On ne meurt jamais en fait ….