L’ancien président brésilien pourrait être incarcéré dans quelques jours suite au rejet de sa demande d’habeas corpus par la Cour Suprême Fédérale la nuit dernière.
Luiz Inacio « Lula » da Silva, fondateur et leader du Parti des Travailleurs (gauche), président de la République fédérative du Brésil de 2003 à 2010, est accusé d’avoir accepté de la part d’une entreprise de construction la mise à disposition d’un luxueux appartement en bord de mer en échange de l’attribution de marchés de la multinationale publique Petrobras.
Reconnu coupable de « corruption passive » et de « blanchiment d’argent » dans cette « affaire du triplex », il a d’abord été condamné en 2017 à neuf ans de prison puis cette peine a été confirmée en appel et portée à 12 ans d’emprisonnement le 24 janvier dernier (Guyaweb du 24/01/2018).
Les avocats de Lula ont alors annoncé leur intention de faire invalider cette décision par les instances judiciaires supérieures et ils ont déposé auprès de la Cour Suprême Fédérale une demande d’habeas corpus devant permettre à l’ancien président de ne pas être incarcéré pour accomplir sa peine tant que tous les recours dont il dispose n’auront pas été épuisés.
Après onze heures de débats retransmis en direct à la télévision, c’est cette demande qui a été rejetée dans la nuit du mercredi 4 au jeudi 5 avril par la plus haute instance judiciaire du Brésil à une courte majorité de six voix contre cinq, les juges opposés à l’habeas corpus soulignant la nécessité d’appliquer la jurisprudence en vigueur afin de montrer que dans sa lutte contre la corruption la justice est bien décidée à refuser l’impunité et à rendre effectives les peines d’emprisonnement dès leur confirmation en appel.
Cela a en effet déjà été le cas pour des dizaines de hauts responsables de tous les partis politiques et de nombreux et puissants chefs d’entreprises, incarcérés suite à leur condamnation résultant de l’enquête dite du Lava Jato (« lavage express ») lancée en 2014 pour démanteler les tentaculaires réseaux de corruption en place autour de l’entreprise Petrobras et pour démontrer que « personne n’est au-dessus de la loi ».
L’application de cette jurisprudence à Lula a toutefois d’énormes implications politiques en raison de son statut d’ancien président de la République mais aussi du fait de sa position de favori pour l’élection présidentielle d’octobre prochain, à laquelle il souhaite se présenter en dépit de sa condamnation qui le rend inéligible et pour laquelle il a commencé à faire activement campagne ces dernières semaines avec le soutien du Parti des Travailleurs.
Lula et ses partisans continuent de dénoncer les multiples procédures judiciaires à son encontre comme relevant d’une persécution politique visant à l’empêcher de revenir au pouvoir et après la décision rendue cette nuit par la Cour Suprême Fédérale le Parti des Travailleurs a regretté « un jour tragique pour la démocratie », alors que des milliers de personnes étaient réunies à Brasilia pour soutenir l’ancien président ou pour se réjouir de ses déboires judiciaires.
Adulé par les uns, détesté par les autres, Lula est en effet une figure politique très controversée et son incarcération désormais probable va singulièrement compliquer la possibilité qu’il parvienne à se présenter à l’élection présidentielle, pour laquelle le favori des sondages serait alors le candidat d’extrême-droite Jair Bolsonaro, officier à la retraite et nostalgique de la dictature militaire qui a régné sur le Brésil de 1964 à 1985 (Guyaweb du 02/02/2018).
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