Largement élu fin octobre, l’ancien militaire Jair Bolsonaro a débuté son mandat de quatre ans à la tête du Brésil ce mardi 1er janvier 2019.
Après avoir été présidé durant treize années par des présidents de gauche issus du Parti des Travailleurs, Luis Inacio « Lula » da Silva (2003-2010) et Dilma Rousseff (2011-2016), suivies de deux années de transition sous la houlette du centriste Michel Temer, c’est un changement radical que connaît aujourd’hui le Brésil avec l’accession au pouvoir de l’ancien capitaine parachutiste, député durant 27 ans et positionné à l’extrême droite de l’échiquier politique brésilien.
Viscéralement hostile au communisme, au socialisme et à tout ce que représente la gauche incarnée au Brésil par le Parti des Travailleurs (PT), Jair Messías Bolsonaro a promis de s’attaquer au « marxisme culturel » qui a selon lui contaminé la société comme les institutions et de s’attaquer frontalement à la corruption, à l’insécurité et au marasme économique dont il rend responsable ses prédécesseurs à la tête du pays.
Ces promesses de campagne ont permis à Jair Bolsonaro de remporter haut la main l’élection présidentielle face au candidat du PT et elles ont été réitérées par le nouveau président brésilien depuis son investiture ce mardi 1er janvier ainsi que par ses ministres dont un tiers sont d’anciens militaires, ce qui est aussi le cas du nouveau vice-président Hamilton Mourão.
La lutte contre la corruption généralisée et la criminalité endémique est désormais pilotée par le juge Sergio Moro à la tête d’un super-ministère de la Justice incluant également la Sécurité publique et qui est devenu célèbre et très populaire pour avoir dirigé la vaste enquête anti-corruption dite « Lava Jato » ayant conduit notamment à la lourde condamnation et à l’emprisonnement de Lula : « la mission prioritaire que m’a confiée le président est claire : en finir avec l’impunité dans les cas de corruption et combattre le crime organisé pour réduire les délits violents » a déclaré Sergio Moro lors de sa prise de fonctions.
L’autre poids lourd du nouveau gouvernement brésilien est Paulo Guedes, économiste issu du berceau du néo-libéralisme qu’est l’Ecole de Chicago et qui dirige à présent un super-ministère de l’Economie regroupant également les Finances, l’Industrie et la Planification, avec un programme d’ajustement structurel applaudi par les marchés financiers et prévoyant notamment un vaste programme de privatisations, une réduction drastique des dépenses publiques et une profonde réforme du système de retraites qui absorbe actuellement une grande partie du budget de l’Etat.
Un autre ministère emblématique du tournant que représente pour le Brésil l’entrée dans l’ère Bolsonaro est celui de l’Agriculture et de la Pêche désormais dirigé par Tereza Cristina Corrêa da Costa Dias, jusqu’alors députée membre de l’influent lobby des grands propriétaires terriens et de l’agro-business et qui aura désormais la main sur la délimitation des terres indigènes, une attribution source de profonde inquiétude chez les défenseurs des peuples autochtones et les organisations écologistes soucieuses de préserver le « poumon vert » qu’est l’Amazonie.
« Plus de 15% du territoire national est démarqué comme terre indigène et quilombolas [territoires des descendants de Noirs Marrons, ndlr]. Moins d’un million de personnes vivent dans ces lieux véritablement isolés du Brésil, exploités et manipulés par les ONG. Ensemble nous allons intégrer ces citoyens et valoriser tous les Brésiliens » a déclaré Jair Bolsonaro à propos d’une décision qui vise à ouvrir ces terres à l’exploitation commerciale mais dont l’application concrète, comme pour beaucoup d’autres, suppose qu’elle soit approuvée par un Congrès atomisé dans lequel le nouveau président et son parti ne disposent pas d’une majorité stable.
A l’issue du premier conseil des ministres de l’ère Bolsonaro qui s’est tenu ce jeudi (photo de Une), le ministre de la Maison civile – équivalent de chef du gouvernement – Onyx Lorenzoni a toutefois clairement réaffirmé la volonté du président élu d’appliquer sans délai le programme ultra-libéral et ultra-conservateur sur lequel il a été élu, ce qui passe notamment par une vaste purge idéologique au sein des institutions publiques et le renvoi de milliers de fonctionnaires assimilés à des partisans du PT, les citoyens ayant selon lui clairement exprimé leur rejet des « idées socialistes et communistes qui sur les trente dernières années nous ont conduit au chaos actuel ».
Sur le plan international ces positions sont très en phase avec celles de la « droite radicale » portées aux Etats-Unis par Donald Trump, source d’inspiration et soutien de poids pour Jair Bolsonaro, ce qui devrait également conduire à une évolution profonde de la diplomatie du Brésil que le nouveau président entend réorienter dans une posture de protectionnisme assumé, de défense des « valeurs occidentales et chrétiennes », de rejet de « l’imposture climatique » et de lutte contre les « dictatures » de gauche en place selon lui à Cuba, au Nicaragua et au Venezuela.
Photo de Une: Jair Bolsonaro entouré de Hamilton Mourão (à sa droite) et Onyx Lorenzoni (à sa gauche) ce jeudi 3 janvier 2019 à Brasilia.
2 commentaires
n est pas abordée dans cet article la nature des relations à laquelle devra s’attendre la France (et donc aussi la Guyane) avec le Brésil avec un tel gouvernement ….
jamais deux sans trois …. (Donald John Trump, Recep Tayyip Erdoğan, et Jair Messías Bolsonaro) – et tous ces peuples (Amérindiens au Nord comme au Sud; Kurdes) qui en souffrent !