Acculé par la rue, lâché par l’armée, le président bolivien a quitté le pouvoir ce dimanche.
Après trois semaines de protestations de plus en plus violentes contestant sa réélection pour un 4e mandat à l’issue du scrutin du 20 octobre dernier (Guyaweb du 25/10/2019), Evo Morales a finalement été contraint de renoncer à ses fonctions après 14 ans à la tête de l’Etat.
Alors que les affrontements entre ses adversaires et ses partisans avaient déjà fait des centaines de blessés et trois morts et qu’ils s’intensifiaient, la situation a commencé à basculer vendredi 8 novembre lorsque de nombreux policiers se sont mutinés et ont rejoint les contestataires, laissant sans protection les bâtiments officiels et notamment le siège de la présidence et du Parlement dans la capitale La Paz.
Dimanche matin l’Organisation des Etats Américains chargée d’un audit a affirmé que des irrégularités « nombreuses et extrêmement graves » entachaient le scrutin présidentiel du 20 octobre et elle a recommandé l’organisation d’une nouvelle élection, ce qui a immédiatement été accepté par Evo Morales.
Mais tandis que les manifestations et les violences continuaient et que de nombreux ministres, parlementaires, gouverneurs et maires annonçaient leur démission, le chef des forces armées boliviennes a « suggéré » à Evo Morales de « renoncer à son mandat présidentiel » pour préserver la « stabilité » du pays et permettre sa « pacification ».
Réfugié dans la province du Chapare au centre de la Bolivie, Evo Morales a alors annoncé sa démission afin de favoriser le retour à « la paix sociale » tout en demandant à ses partisans de « continuer à lutter pour l’égalité » et il a stigmatisé le « coup d’Etat » fomenté par des « groupes oligarchiques » ayant « conspiré contre la démocratie ».
La localisation exacte Evo Morales est inconnue mais le président déchu – à qui le Mexique a proposé l’asile politique – a assuré sur Twitter qu’il n’avait pas l’intention de quitter le pays* et il a dénoncé un « ordre d’arrestation illégal » dont il serait l’objet, une affirmation démentie par le chef de la police bolivienne.
En cas de vacance de la présidence la Constitution bolivienne prévoit que ce poste doit être occupé par le vice-président de l’Etat plurinational de Bolivie ou à défaut le président du Sénat ou celui de la Chambre des députés – le parti socialiste d’Evo Morales est majoritaire dans les deux chambres parlementaires – mais tous ont renoncé à leurs fonctions ce dimanche.
La Bolivie est donc confrontée à un vide du pouvoir et à une situation de grande incertitude marquée par la poursuite de nombreux actes de violence – affrontements dans les rues, pillages, saccages, incendies, attaques contre les résidences privées de personnalités politiques.
Tandis que les plus radicaux des adversaires du président déchu veulent la formation d’une « junte de gouvernement » provisoire incluant les chefs de la police et de l’armée, l’Organisation des Etats Américains préconise d’organiser de nouvelles élections dès que les conditions en seront réunies.
*Le ministre des Affaires étrangères mexicain a fait savoir lundi 11 novembre en fin d’après-midi que Evo Morales avait accepté l’asile politique proposé dimanche par le Mexique. Il a demandé que la sécurité du président bolivien déchu soit assurée et qu’un sauf-conduit lui soit délivré afin qu’il puisse quitter la Bolivie, où la situation reste incertaine et chaotique.
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