A l’arrêt depuis le début du conflit russo-ukrainien, la collaboration entre le lanceur russe Soyouz et le Centre spatial guyanais est définitivement enterrée a confirmé hier le président d’Arianespace, Stéphane Israël, en marge du lancement Ariane 5 ce mardi 13 décembre.
« L’année 2022 ne s’est pas passée comme prévue. » Stéphane Israël, le patron d’Arianespace, préfère euphémiser dans la salle de presse du hall Jupiter du Centre spatial guyanais (CSG). Venu échanger sur le dernier vol Ariane 5 de 2022, réalisé avec succès ce mardi 13 décembre, le responsable de la commercialisation des vols n’a pas pu échapper aux questions portant sur l’avenir du secteur spatial européen. Et Stéphane Israël l’a confirmé : il n’y aura plus de lancements Soyouz depuis la base spatiale de Kourou.
« Soyouz, c’est terminé. Il n’y aura pas de prochain lancement depuis le Centre spatial guyanais. Le contexte géopolitique a stoppé net cette coopération, l’invasion de l’Ukraine par la Russie a mis un point d’arrêt à ce que nous pouvions faire ensemble et donc effectivement, il n’y aura plus de lancements Soyouz depuis le CSG.«
La fusée russe permettait aux Européens de disposer d’un panel large de lanceurs allant du léger, Vega, au lourd, Ariane, en passant par le moyen avec Soyouz. Or le déclenchement du conflit russo-ukrainien et les sanctions européennes qui ont frappé le Kremlin en retour ont entraîné dès mars le départ de la centaine d’ingénieurs russes de Guyane. Une surveillance du pas de tir Soyouz était depuis effectuée mais pas la maintenance, laissant entrevoir ce que le président d’Arianespace a confirmé hier.
De quoi obscurcir l’avenir spatial européen alors que le lanceur Ariane 6, annoncé pour la fin de l’année 2023, accuse déjà trois ans de retard et que le premier vol commercial de Vega-C, prévu le 24 novembre, a été reporté au 20 décembre à cause d’un souci technique.
Trou d’air entre la fin d’Ariane 5 et le début d’Ariane 6
« L’année 2022 ne s’est pas passée comme prévue mais les choses progressent. Sur Vega-C, on a dû changer un équipement lié à la coiffe, ce sont des choses qui arrivent. Ce n’est que le 2e lancement de Vega-C, les débuts d’Ariane 5 n’ont pas toujours été faciles« , estime Stéphane Israël.
Quant à Ariane 6, « un programme très lourd« , les choses « avancent. Certes il y a encore des points de passage à passer mais nous sommes dans la dernière ligne droite du développement d’Ariane 6 » dont le carnet de commandes « est plein comme un œuf« , assure Stéphane Israël.
Cependant, pour voir l’un de ces vols commerciaux, il faudra attendre 2024. Le lancement inaugural d’Ariane 6, prévu pour le quatrième trimestre 2023, sera le seul l’année prochaine puisque plusieurs mois d’analyse seront nécessaires à l’issue de ce premier vol avant de pouvoir rééditer la chose.
Et avec la fin programmée d’Ariane 5 en clôture du premier semestre 2023 – il ne reste que deux missions au lanceur lourd – le temps risque d’être long pour les clients d’Arianespace jusqu’à ce que la grande sœur Ariane 6 prenne le relais.
« Il faut être pragmatique, on ne peut pas se permettre de garder trop longtemps les satellites au garage« , reconnaît Sylvie Retailleau, la ministre de la Recherche et de l’Enseignement supérieur, actuellement en Guyane et présente lors du lancement mardi soir. Consciente du coût financier et en termes d’image du retard d’Ariane 6, la ministre a préféré souligner « l’accord de préférence européenne et la réaffirmation au soutien du futur lanceur lourd » ratifié par les trois leaders spatiaux européens – France, Italie et Allemagne – lors de la dernière réunion ministérielle des 22 et 23 novembre.
Stéphane Israël lui aussi préfère voir le verre à moitié plein plutôt qu’à moitié vide. Il se projette sur Ariane 6 « dont 18 vols ont déjà été vendus » vante-t-il. Le président d’Arianespace table sur 4 vols en 2024 pour Ariane 6 puis une montée en puissance les années suivantes avec, « on l’espère, 8 lancements en 2025 et 10 en 2026. En plus des 13 ou 14 Vega-C signées, le carnet de commandes n’a jamais était aussi plein« . Et la concurrence, jamais aussi féroce.
Photo de Une : la fusée russe Soyouz sur son pas de tir du Centre spatial guyanais en décembre 2020 © Archives Guyaweb
1 commentaires
Que va devenir le pas de tir ?
Une réhabilitation environnementale des savanes est-elle envisagée ?
Se sont-ils seulement posés la question ?
Probablement pas si l’on considère les friches industrielles de Diamant, Véronique, Ariane 1…
La biodiversité, 5e roue du carrosse du CSG (2 salariés seulement pour assurer la gestion naturelle de la surface de la Martinique) !