Deux semaines après le passage de Chido, qui a fait au moins 39 morts et 4 000 blessés, le Premier ministre est en visite sur l’archipel de l’Océan Indien pour poser les bases de la reconstruction du territoire ultramarin, dévasté le 14 décembre par le cyclone le plus intense depuis 90 ans. Plusieurs annonces sur la sécurité, le logement, l’école et l’économie ont été faites par François Bayrou.
Express et raccourci de 24h, le déplacement du Premier ministre à Mayotte, deux semaines après le passage du cyclone Chido qui a fait au moins 39 morts et 4 000 blessés, a débuté ce lundi matin alors que l’électricité est encore coupée pour plus de la moitié des foyers mahorais.
Très attendu, François Bayrou est arrivé dans l’archipel de l’Océan Indien en compagnie d’une forte délégation ministérielle. Les ministres d’Etat Elisabeth Borne (Education nationale) et Manuel Valls (Outre-mer), mais aussi Valérie Létard (Logement), Yannick Neuder (Santé) et Thani Mohamed Soilihi (Francophonie et Partenariats internationaux) font en effet partie du déplacement.
Plusieurs rencontres avec les acteurs économiques, le monde de l’éducation, les forces de sécurité et les élus locaux sont organisées ce lundi. Mais le Premier ministre, nommé le 13 décembre après la censure de son prédécesseur Michel Barnier, est surtout attendu sur des annonces concrètes pour la reconstruction du département le plus pauvre de France, en grande partie détruit après le passage de Chido, le cyclone le plus intense qu’ait connu l’archipel depuis 90 ans.
À l’issue de cette « journée de dialogue », François Bayrou a fait d’un plan d’aide, baptisé « Mayotte Debout », qui doit permettre de donner aux 320 000 habitants « des réponses rapides » a-t-il déclaré à sa descente de l’avion ce lundi matin dans un échange avec la presse relayé sur le compte X du Premier ministre.
Ce plan de reconstruction fixe un objectif de deux années pour reconstruire l’archipel où les bâtiments en dur, comme les quartiers informels en tôle, ont été soufflés le 14 décembre par des rafales de plus de 220 km/h. Il précèdera d’autres mesures à plus long terme. « Il y aura une deuxième phase d’ici quelques mois. Parce qu’il ne s’agit pas seulement de reconstruire Mayotte comme elle était. Il s’agit de dessiner l’avenir de Mayotte, différent » a précisé ce lundi François Bayrou.
La question de l’immigration illégale dans l’archipel est notamment dans la ligne de mire du gouvernement. En marge de sa déambulation à Mayotte, le Premier ministre a été questionné sur le sujet. Revenir sur le droit du sol à Mayotte, déjà restreint, « est une question qu’il faut se poser » a répondu le Premier ministre.
Demeuré français en 1975 après l’indépendance des Comores, le 101e département est confronté à « un problème d’immigration brûlant » selon François Bayrou, qui a également cité ce lundi la Guyane comme territoire connaissant « des difficultés particulières » en matière d’immigration. Officiellement peuplé de 320 000 habitants selon l’Insee, il y aurait à Mayotte « autour de 100 000 » personnes supplémentaires en situation irrégulière, majoritairement venues des Comores voisines, avait déclaré le très à droite ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau lors de son déplacement dans l’archipel le 17 décembre.
Mesures concrètes
Venu lui aussi à Mayotte les 19 et 20 décembre, Emmanuel Macron a promis, à la fin d’une visite mouvementée, une loi spéciale pour « rebâtir » l’île, mais aussi « mettre fin » aux bidonvilles où s’entassent les personnes sans papiers. Ce qu’a confirmé François Bayrou ce lundi en affirmant que le plan d’aide prévoit d’« interdire et empêcher la reconstruction des bidonvilles », précisant que ces dispositions pourront être « inscrites dans la loi ». Le Premier ministre a par ailleurs annoncé un « recensement général et précis de la population (…) une opération vérité » suite à la « prise de conscience » générée par la catastrophe.
Plusieurs mesures urgentes ont également été annoncées, notamment sur l’électricité qui doit être « rétablie d’ici la fin du mois de janvier« . 200 renforts d’EDF, le déploiement du génie militaire et de 200 groupes électrogènes permettront d’atteindre cet objectif, alors que l’électricité est encore coupée pour plus de la moitié des foyers mahorais.
Pour l’accès à l’eau, le Premier ministre promet un retour aux niveaux de production d’eau potable d’avant le cyclone « avant la fin de la semaine ». Selon François Bayrou, d’ici juin, la production sera même supérieure à celle avant le cyclone grâce à une retenue colinaire en plus et une usine de dessalement supplémentaire permettant d’atteindre 40 000 m³ d’eau par jour.
Pour faciliter l’accès aux télécommunications, également touchées par le cyclone, le Premier ministre annonce le déploiement immédiat de 200 antennes Starlink. Côté transport, l‘aéroport de Mayotte rouvrira aux vols commerciaux « à compter du 1er janvier« , annonce François Bayrou. 140 tonnes de bâches seront également livrées dans la semaine, en complément des 100 tonnes déjà acheminées.
Pour l’école, « la rentrée ne pouvant se faire dans des conditions normales, elle aura lieu selon des modalités adaptées établissement par établissement à partir du 13 janvier » a annoncé François Bayrou. Des tentes-écoles vont être déployées sur l’archipel. Par ailleurs, un « plan vigilance » à Mayotte associant armée et gendarmerie pour « surveiller » les établissements scolaires sera mis en place et constitue l’une des principales mesures annoncées sur la sécurité.
Sur l’économie, François Bayrou a annoncé une « suspension des cotisations sociales pour toutes les entreprises jusqu’au 31 mars » à Mayotte, et « une aide financière d’urgence pour toutes les entreprises » avec un plafond de 20 000 euros afin de soutenir et relancer l’économie mahoraise. Il évoque aussi un « dispositif exceptionnel d’activité partielle » pour préserver l’emploi. Lui aussi courrra jusqu’au 31 mars.
Sur le logement, le Premier ministre a annoncé la création d’un nouvel établissement qui intégrera l’établissement public foncier local pour planifier la reconstruction de l’île.
Une loi spéciale pour Mayotte
Pour faciliter cette reconstruction, François Bayrou a annoncé la mise en place d’une loi d’urgence. Le texte, qui reprendra des dispositions déjà comprises dans un projet de loi en gestation, sera présenté le 3 janvier à l’occasion du premier Conseil des ministres du gouvernement Bayrou. Il a d’ores et déjà été adopté par la commission permanente du Conseil d’Etat le 22 décembre dernier. Il sera ensuite soumis à l’examen des députés « d’ici 15 jours« .
Cette loi spéciale prévoit un panel de mesures exceptionnelles pour faciliter la reconstruction du département en dérogeant à certaines règles fiscales ou d’urbanisme. Par exemple, l’instruction des demandes de permis de construire sera simplifiée pour être accélérée, les règles relatives aux marchés publics feront également l’objet de dérogations (négociations sans publicité mais avec mise en concurrence en dessous de 2 millions d’euros), le gouvernement pourra prendre des mesures d’expropriation élargies pour garantir la maîtrise foncière et faciliter la réalisation d’ouvrages publics ou d’opérations d’aménagement.
Puis, à plus long terme, une loi programme « de refondation de Mayotte » doit par ailleurs être mise au point avec les élus de Mayotte « dans les trois mois ». Pour financer la reconstruction, « un financement par des prêts garantis par l’Etat » sera mis en place à destination des familles mahoraises. Ces prêts seront « assumés par la Banque des territoires, dans des conditions exceptionnelles réservées aux catastrophes naturelles de grande ampleur comme Chido ». Néanmoins, cette déclaration laisse reposer le financement de la reconstruction sur les épaules des Mahorais et des collectivités locales.
Photo de Une : le Premier ministre est en déplacement à Mayotte ce lundi afin d’y annoncer un plan de reconstruction de l’archipel dévasté par le cyclone Chido le 14 décembre dernier © Compte X François Bayrou
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